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Des maillots de bain libérateurs

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Honnis par les naturistes, les maillots de bains en sont-ils pourtant leurs ennemis ? Pour la chercheuse Audrey Millet, une lecture différente de l’histoire montre qu’ils ont contribué à libérer la femme, l’aidant à se réapproprier son corps, et sa nudité. Naturisme Magazine consacre deux pages à son ouvrage dans son N°76, daté mai-juin 2022. Extraits.

Par Jean-Luc Bouland

« Il est inacceptable qu’il existe encore des lois en vigueur sanctionnant les femmes qui souhaitent se (dé)vêtir aussi librement que le peuvent les hommes. Cette discrimination est par nature anticonstitutionnelle dans une société qui doit nous garantir à toutes et tous une égalité fondamentale ». Ainsi s’exprime Marine Millan, auteure en mars 2022 d’une pétition en ligne suite à une amende pour s’être baignée torse nu dans une piscine municipale, à Toulouse, en infraction avec le règlement intérieur. Preuve, s’il en est besoin, que le corps des femmes est toujours considéré différemment de celui des hommes, surtout quand il est très peu vêtu. Ceci n’est pas anecdotique, défraye régulièrement la chronique estivale, et méritait un livre sur le sujet.

C’est ce que vient de faire la chercheuse Audrey Millet, spécialiste de l’histoire de l’habillement, dans un ouvrage intitulé Les dessous des maillots de bain. Le parti pris est simple, et largement démontré. De tous temps, les hommes se sont méfiés des femmes, surtout quand elles montraient leurs corps, et ont tout fait pour le cacher, ou le dénigrer. « L’histoire du maillot est donc tributaire des représentations corporelles, de l’acceptation ou non de la nudité, des dissymétries (entretenues) entre masculin et féminin (…) On perçoit aussi dans cette pièce de tissu une histoire des peurs masculines, de la frustration, et un emblème de la féminité » écrit-elle en introduction.

Ensuite, en quelques 270 pages, et 4 parties aussi bien documentées qu’argumentées, elle enfonce le clou, montrant les rapports étroits entre la peur de l’eau, l’appréhension envers le bain, et le rejet ou le contrôle du corps de féminin, et de sa nudité, et cela depuis l’antiquité. « L’analyse de la baignade dans les mythologies gréco-romaines indique au moins trois peurs : celles de la mort, de la femme et de la nudité (p17) ».

Peur et dénigrement du corps féminin

Bien que très documenté, accumulant les références, l’ouvrage se lit bien, car abordant un thème qui évoque notre vie quotidienne, comme l’ont fait avant elle d’autres chercheurs, plus ou moins contemporains, sur des thèmes similaires. Mais la différence, là, est qu’il apporte un regard neuf, car écrit par une femme, qui décrypte les atteintes implicites et explicites portées contre son sexe. « Le voilement et le recouvrement confirment le tabou du corps féminin, la nécessité de le subtiliser au regard masculin et le kidnapping de son enveloppe corporelle (p35)». On est là dans l’Antiquité, au début de l’ouvrage, et cela durera pendant des millénaires, bien qu’avec des variantes (…)

Lire la suite dans Naturisme Magazine N°76.

Le livre – Bronzette, monoï et bikini… à la piscine comme à la plage, baignade rime avec détente et légèreté. Pourtant, cette pratique a longtemps été vue d’un mauvais œil et le vêtement de bain n’a conquis nos garde-robes qu’assez récemment.

Hantées par les récits mythologiques, nos sociétés se sont construites dans la crainte de l’eau,  laquelle faisait écho la peur du féminin, associé à l’humidité et l’étrangeté. Il nous a fallu des siècles pour apprivoiser les flots, et ce n’est qu’à la fin du XIXe que la baignade et la natation se démocratisent, ouvrant la voie au développement d’une nouvelle industrie : celle du maillot de bain, qui fera fi de la pudeur et participera au découvrement des corps. Mais si les femmes se libèrent progressivement d’une invisibilisation millénaire, c’est pour mieux subir les injonctions  une beauté normée, une perfection inatteignable, poussant à l’épilation et aux régimes en vue du fameux summer body.

De la chemise de bain au burkini en passant par le bikini et le monokini, Audrey Millet démontre avec impertinence que le maillot de bain est une pièce moins futile et plus politique qu’il n’y paraît. À travers son histoire, c’est une relecture des normes de genre et du rapport au corps (et à la nudité) qu’elle nous propose.

  • Ed. Les Périgrines – Collections Docs et Essais – 280 pages – 19 €

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